Sans provocation j’éprouve l’envie de répondre que je n’en sais rien. En effet, alors que nous ne sommes pas encore sortis du fléau de la Covid-19 malgré l’espérance suscitée par le début poussif des vaccinations, nous n’avons pas cessé, depuis le mois de mars 2020, d’alterner, pour les uns, entre la certitude que l’avenir sera autre, métamorphosé, et que l’ancien monde n’aura plus cours et, pour les autres, le pressentiment que non seulement rien ne changera mais même sera pire si on suit l’intuition de Michel Houellebecq.

Face à ces approches contrastées, qui pourrait avoir l’arrogance de trancher péremptoirement et de s’aventurer avec assurance pour défricher les terres vierges de l’avenir si on rêve d’une révolution ?

L’imagination qui nous est demandée est d’autant plus difficile à cultiver que rien d’homogène ne surgira systématiquement de notre réflexion, que les sphères du privé et du public, de l’intime et de l’apparent ne seront pas forcément sur le même registre et que la pensée même profonde sur les généralités – le philosophe Bruno Latour perçoit un lien indissoluble entre le sanitaire et l’écologique – ne nous aidera pas pour identifier, demain, notre monde à nous, notre patrie personnelle.

Notre futur – et c’est une banalité – ne se dispensera plus, dans son appréhension du monde, d’intégrer la menace toujours possible de virus et d’épidémies de toutes sortes avec la conséquence qu’une forme sinon d’impuissance, du moins de modestie humaine nous habitera singulièrement et collectivement.