François Heilbronn
Professeur des universités associé à Sciences Po

Depuis les années 1980, les théories s’intéressant aux stratégies de l’entreprise se sont nourries de celle du « First Mover Advantage ». Elles se sont inspirées d’une idée de stratégie militaire, décrite par Sun Tzu dans « L’art de la guerre » en 400 avant notre ère : « En général, qui occupe le premier le champ de bataille et attend son ennemi est tranquille ; qui entre en scène le dernier et se précipite au combat est épuisé. ».

A partir de ce principe favorable à l’entrepreneuriat tout un corpus théorique a vu le jour. Le succès grandissant des GAFAM depuis vingt ans a validé ce modèle de façon retentissante principalement dans les nouvelles technologies.

Ainsi Amazon, pionnier de la vente de livres sur internet, est devenu en vingt ans l’acteur dominant de la distribution avec une valeur en bourse trois fois supérieure à celle de Wal-Mart, pourtant premier distributeur au monde en chiffre d’affaires.

Facebook a créé le marché des réseaux sociaux et des revenus publicitaires qui l’alimentent en captant même jusqu’à 80% de ceux-ci aux États-Unis.

Apple, cet acteur marginal des ordinateurs personnels en 2000, a réussi à se réinventer en créant et en développant le marché des Smartphones. Cette préemption face à des acteurs installés comme Sony ou Ericsson lui a permis de multiplier sa valeur en bourse plus de douze fois en dix ans.

Au-delà des GAFAM, de nouveaux acteurs-créateurs de marché, sont en train également de bâtir des positions dominantes qui mettent à mal les acteurs installés.

Dans la vidéo, Netflix déjà un pionnier de location à distance de DVD est devenu en moins de dix ans le leader mondial du streaming vidéo, devançant ainsi les rois de l’Entertainment comme Disney/Fox ou Time-Warner/HBO-Turner. La valeur en bourse de Netflix représente déjà 70% de la valeur de l’ensemble Disney et Fox.